Le plafond de verre : que faire ?
 

Incitations et législation
 

      De nombreuses incitations et législations ont été mises en place afin de lutter contre la discrimination sexuelle dans le monde du travail. Outre les principaux labels que nous avons cités dans la section « historique » de ce site, de nombreuses réglementations européennes et internationales visent à lutter contre les inégalités hommes-femmes au travail.

 

      Par ailleurs, en plus de l’effet incitant des labels, il existe également d’autres moyens d’incitation à l’égalité hommes-femmes dans les entreprises. Parmi ceux-ci, nous pouvons citer les différents classements d’entreprises, les guides d’achats responsables et les prix discernables aux entreprises favorisant la lutte contre la discrimination sexuelle. Tous ces moyens d’incitation ont en commun d’agir sur l’image de marque et l’attractivité des entreprises aux yeux de divers publics : les salariés actuels de l’entreprise, les futurs candidats à l’embauche, les consommateurs, et même les actionnaires (ORSE, 2004).


Classement annuel visant à aider les femmes et les entreprises à concilier vie professionnelle, familiale et personnelle.


      Toutefois, ces mesures, aussi utiles soient-elles, ne suffiront sans doute pas à pallier les inégalités hommes-femmes dans le monde du travail. Des changements plus profonds sont nécessaires; c’est ce que nous allons tenter de traiter dès à présent.

 

Changements plus profonds
 

Comme nous pouvons le constater en parcourant les différentes rubriques de ce site, le plafond de verre est un mécanisme complexe. Dès lors, un éventail le plus large possible de mesures est nécessaire afin de le combattre. En effet, ce phénomène prend non-seulement racine au sein même de l’entreprise, mais aussi dans l’enseignement, la famille et la société tout entière.

       Dans un souci de clarté, nous allons nous baser sur la classification des mesures proposées par GEF/Accenture (2003). D’une part, il y a des mesures visant à mettre les femmes en situation de réussir. D’autre part, il y a celles qui visent à faciliter leur quotidien. Enfin, il y a celles qui tendent à faire évoluer les règles du jeu, en changeant certaines façons de faire et certains comportements ou attitudes des hommes, des femmes et des managers. Toutes ces mesures ont une visée commune : accroitre le pourcentage des femmes dans les instances dirigeantes.

 

 

      1.Mesures visant à mettre les femmes en situation de réussir

      Pour ce faire, nous pourrions commencer par résoudre les problèmes de réseaux et de parrainage des femmes . En effet, dans les causes du plafond de verre, nous avons mis en évidence la difficulté pour les femmes à trouver un parrain, et à intégrer les réseaux formels, mais surtout informels (Schor, 1998). Pourtant, nous avons aussi vu que le parrainage et les réseaux constituent une aide précieuse pour l’avancement professionnel, et ceci est d’autant plus vrai pour les femmes (Catalyst, 2001 ; Higgins & Kram, 2001).

      Il s’agirait donc de mettre en place des mesures permettant de favoriser le développement des réseaux des femmes, ainsi que leur parrainage. Les entreprises pourraient par exemple mettre en place des programmes visant à faire se rencontrer les parrains/marraines potentiels et les nouvelles recrues, organiser des réunions, publier des listes de contacts, etc. Par ailleurs, si l’on s’en tient à l’approche de Brass (1985), il serait utile d’encourager les entreprises à favoriser les équipes de travail mixtes, afin de permettre aux femmes d’intégrer les réseaux centraux de l’organisation.

      Ensuite, il serait judicieux d’encourager le « coaching » des femmes cadres.
Le « coaching » peut se définir comme « étant un acte et un outil de management : c’est un accompagnement individuel, dans un moment clé de la vie professionnelle du salarié, par un coach » (ORSE, 2005). Grâce à l’aide du coach, les femmes qui souhaitent évoluer dans l’entreprise pourront développer des stratégies efficaces pour accélérer l’avancement de leur carrière, bénéficier d’un soutien et apprendre à faire face aux obstacles rencontrés.

      En plus de mettre en place ces programmes de « coaching », les entreprises devraient également encourager le « mentoring » pour les femmes à haut potentiel.
Le « mentoring » peut se définir comme « étant un système de parrainage développé, avec un programme doté d’objectifs clairs et de règles précises, et avec à la clé la possibilité d’accéder à un poste Senior » (ORSE, 2005). Développer cette pratique pour les femmes à haut potentiel permettrait de les mettre en situation de réussir, en facilitant leur opportunité d’avancement professionnel.

      Le fait d’augmenter la visibilité des femmes ayant réussi pourrait également améliorer la  situation. En effet, trop souvent les jeunes femmes manquent de modèles féminins aux plus hauts niveaux de la hiérarchie sur lesquelles elles pourraient modeler leurs aspirations de carrières (BIT, 2004). L’entreprise peut faciliter ces contacts en publiant par exemple des brochures où des femmes hauts placées racontent leur expérience, en organisant par exemple des séminaires de rencontre et des tables rondes.
Par ailleurs, le fait de rendre plus visibles les femmes ayant réussi peut également augmenter l’attractivité de l’entreprise aux yeux des jeunes femmes. En effet, une étude menée par
Heilman (1979) a permis de montrer que des étudiantes étaient plus enclines à intégrer une entreprise mixte, dans laquelle elles pourraient être un membre à part entière, plutôt qu’une entreprise où elles constitueraient une figure de proue ou une minorité.

      Enfin, comme nous l’avons évoqué dans la section « causes du plafond de verre », l’image du manager ayant réussi est associée, tant par les hommes que par les femmes à des caractéristiques masculines (Schein, 1973 ; 1975). Or, le fait de systématiquement augmenter la visibilité des femmes ayant réussi pourrait selon nous sortir le pouvoir de cette dynamique masculine. Cela permettrait de réduire l’impact de ce stéréotype de genre sur l’avancement professionnel des femmes.

 

      2. Mesures visent à faciliter le quotidien des femmes

       Selon les cahiers du CERGOR (2003), ces politiques concernent à la fois les politiques qui favorisent l’avancement des femmes, mais également des politiques pour aider les femmes en général à concilier vie professionnelle et vie familiale. Par ailleurs, il s’agit du domaine dans lequel les entreprises interviennent le plus (GEF/Accenture, 2003).

       Voici quelques exemples de facilitation du quotidien des femmes en accord avec ces politiques « women-friendly ». Ces démarches vont en plus de tenter de briser le plafond de verre diminuer le taux d’absentéisme des femmes qui est en moyenne plus élevé que celui des hommes.
Le tableau réalisé par Olgiati et Shapiro (2002) ainsi que celui de Belghiti (2002) présentés dans les cahiers du CERGOR (2003) nous proposent de nombreuses solutions afin de faciliter le quotidien des femmes. En voici quelques-unes.

Tout d’abord, une flexibilisation du temps de travail serait nécessaire afin de lutter contre le plafond de verre.

Ensuite, une meilleure préparation des congés de maternité et/ou parentaux serait bénéfique. Toutefois, une facilitation des retours de congé maternité est importante aussi, et le maintien du lien avec l’entreprise durant le congé peut faciliter ce retour (ORSE, 2004).

La création de certains services divers soulageant les femmes, comme par exemple la création de crèches, pourrait être vue comme une méthode afin de combattre le phénomène du plafond de verre. Toujours dans le domaine de la garde d’enfants un service « urgence » de baby-sitters pourrait être mis en place cela dans le souci s’assurer une plus grande disponibilité parentale.

 

      3.Mesures visant  à faire évoluer les règles du jeu

      Il serait intéressant d’opérer des modifications au niveau des mentalités des hommes, des femmes et des entreprises.

 

Beaucoup de managers s’appuient encore sur des stéréotypes de genre, tels que « les femmes travaillent moins que les hommes en terme de volumes horaire », « elles refusent la mobilité géographique » ou « elles ne sont pas intéressées par des postes de décision ». Comme nous l’avons vu dans la section « causes du plafond de verre » de ce site, une enquête menée par Korn/Ferry et Catalyst (1996) a permis de réfuter bon nombre de ces stéréotypes. Malgré cela, ils semblent toujours bien ancrés dans la mentalité de bon nombre de dirigeants.

Dès lors, comme le propose le BIT (2004), il serait utile de mettre en place des programmes de sensibilisation à tous les niveaux de la hiérarchie afin de réfuter les différents stéréotypes infondés qui entourent les capacités et le dévouement des femmes au travail. Il faudrait également sensibiliser les cadres à la compréhension des questions sexospécifiques et familiales. De plus, comme nous l’avons vu dans la section « des barrières infondées », les femmes peuvent apporter une contribution précieuse à l’image et à la productivité de l’entreprise. De ce fait, il faudrait également sensibiliser les différents niveaux hiérarchiques à ce bénéfice potentiel.

 Il serait utile d’organiser des séminaires, débats, colloques, conférences et formations afin de sensibiliser les hommes, femmes et les équipes dirigeantes à la problématique de l’égalité professionnelle. Cette sensibilisation des hommes et des femmes à tous les niveaux hiérarchiques semble primordiale. Liff (1999) affirme en effet que la mise en œuvre des mesures d’égalité professionnelle passe nécessairement par ce processus de sensibilisation.

Une autre solution serait de mettre en place une formation pour permettre aux responsables de sélectionner de manière non discriminatoire et promouvoir des comportements égalitaires ou encore de nommer une personne ressource dans la lutte contre les discriminations et le plafond de verre.

Les femmes effectuant la majeure partie des tâches ménagères, il est bien plus difficile pour elles d’avoir une carrière réussie ET une vie familiale heureuse (BIT, 2004). Afin de réduire cette contrainte des femmes qui les empêche de se lancer pleinement dans leur carrière, il faudrait changer la mentalité des hommes en les amenant à accepter une plus grande prise en charge des tâches ménagères et éducatives. Une sensibilisation  au partage équitable des tâches entre les hommes et les femmes semble donc importante.

Pour finir, nous voudrions évoquer un moyen plus controversé pouvant mener à une évolution des règles du jeu ; il s’agit du système des quotas. Si ce système est utilisé de manière trop rigide, il risque d’aboutir à la nomination de femmes non qualifiées (ORSE, 2004). Toutefois, utilisé efficacement, il peut concourir à une meilleure représentation des femmes dans les postes à responsabilités. Par ailleurs, ce système de quotas peut permettre d’atteindre une « masse critique ». Selon cette théorie, « au-delà d'un certain seuil, les femmes au pouvoir sont suffisamment nombreuses pour modifier la culture politique et donc ouvrir la porte toute grande à leurs consoeurs » (L. Saint-Martin, 1993, p.199). Sans faire explicitement allusion à cette théorie, L’ORSE (2004) confirme cela en affirmant qu’un certain taux de représentation des femmes dans les entreprises est indispensable à un changement organisationnel.

 

 

Le plafond de verre : ampleur du phénomène
Présentation générale du plafond de verre
Que faire contre le plafond de verre ?

 

Comment mesurer le plafond de verre ?

 

Historique du plafond de verre
Bibliographie